Entretien avec François Revardeaux, Consul général de France à Milan. Réalisé par Milvia Pandiani-Lacombe.
À l’occasion de sa venue à l’Alliance Française de Trieste, le 20 juillet dernier, François Revardeaux, Consul Général de France à Milan, a bien voulu nous accorder cet entretien pour évoquer sa mission, et les actions qu’il envisage de mener dans le cadre de ses fonctions.
En quoi consiste votre mission de Consul Général de France à Milan ?
Tout d’abord, je dois dire que je suis heureux d’avoir pu visiter pour la première fois Trieste, une ville que je ne connaissais pas, que j’ai pu commencer à découvrir, trop rapidement pour cette fois, et où j’ai pu faire de très belles et très intéressantes rencontres dans tous les domaines.
Pour répondre à votre question, je dirais que mon rôle depuis Milan est double.
D’une part, et c’est la raison d’être première du Consulat général, assurer pour les Français de la circonscription les services administratifs comme la délivrance de passeports ou de cartes d’identité, pour ne citer que ces documents et apporter une assistance aux Français, résidents ou de passage, qui peuvent être en difficulté.
Le Consulat général de Milan est aussi pôle national pour les questions de nationalité. Autrement dit, ce sont mes services qui se chargent d’examiner les dossiers de demande de naturalisation, ce qui m’a d’ailleurs donné l’occasion depuis ma prise de fonctions en septembre dernier, d’organiser deux cérémonies très émouvantes d’entrée dans la nationalité.
D’autre part, naturellement sous l’autorité de l’Ambassadeur de France en Italie, Christian Masset, et en lien avec l’Ambassade à Rome, j’ai un rôle de suivi de toutes les principales questions d’intérêt pour la coopération entre la France et l’Italie dès lors que les acteurs se trouvent dans ma circonscription consulaire. Dans ce cadre, je rencontre généralement quand je me déplace, et cela arrive aussi souvent que possible, les principales autorités, ici à Trieste, j’ai eu la chance de rencontrer par exemple le Président de la Région, le Maire, le Préfet, le Questeur, mais aussi tous les acteurs institutionnels ou économiques. C’est dans ce cadre que, toujours à Trieste, j’ai pu échanger avec le Recteur de l’université, le Président de l’autorité portuaire ou le Président de l’aéroport. Mais je tiens aussi à avoir des contacts avec les acteurs économiques, qu’il s’agisse des chambres de commerce ou des organisations comme la Confindustria, les entrepreneurs, les journalistes. Bref, tous ceux qui, d’une façon ou d’une autre peuvent-être intéressés au développement de la coopération bilatérale, et qui peuvent de leur côté apporter des idées ou lancer des initiatives qui vont dans ce sens.
Quelles sont les régions qui relèvent de votre circonscription ? Que représente la communauté française dans l’ensemble de votre circonscription et plus particulièrement dans notre région du Frioul-Vénétie Julienne ?
Et quelle est la mission de notre Consul honoraire de Trieste, M. Riccardo Illy ?
J’ai une compétence sur tout le nord de l’Italie, donc sur la Ligurie, le Val d’Aoste, le Piémont, la Lombardie, le Trentin haut Adige, la Vénétie, l’Émilie-Romagne et, et c’est la raison de mon passage ici, naturellement le Frioul-Vénétie Julienne. C’est donc une circonscription vaste géographiquement et vaste par les secteurs à couvrir, chacune des régions ayant des spécificités très fortes mais toutes se signalant par une très grande richesse et un remarquable dynamisme dans tous les domaines. C’est surtout l’une des plus formidables circonscriptions de tout notre réseau consulaire.
Pour ce qui est de la présence française, nous ne pouvons avoir une vision que de ceux de nos concitoyens qui sont inscrits au Consulat. Ce qui me permet de lancer ici un message à ceux qui ne seraient pas inscrits pour qu’ils fassent cette inscription simple, rapide, et qui peut faciliter certaines démarches. Pour l’ensemble des régions que je couvre, cela représente un peu moins de 20 000 personnes dont environ 300 dans la région du Frioul-Vénétie Julienne.
Puisque la circonscription est si vaste, je peux compter sur l’appui de plusieurs consuls honoraires. Nous avons ainsi un réseau très dense d’agences consulaires à Gênes, Aoste, Turin, Parme, Bologne, Trente, Venise et Trieste.
A Trieste, nous avons la chance et l’honneur que Riccardo Illy, qui est une personnalité éminente de la région et dont j’ai pu mesurer à chaque occasion combien il était connu, respecté et apprécié, ait accepté cette charge. Ses fonctions, comme c’est aussi le cas pour les autres consuls honoraires sont là aussi doubles, d’assistance de premier niveau en cas de problème, en sachant naturellement que le consulat de Milan a vocation à prendre très rapidement le relais, ou plus simplement quand, le cas se présente, de remise des documents dont la demande ne peut être faite qu’à Milan mais qui peuvent être retirés par les usagers dans une agence consulaire plus proche de leur domicile, et de représentation auprès des autorités locales. Les consuls honoraires sont aussi très précieux pour l’action bilatérale grâce à la connaissance qu’ils ont des réalités locales et des opportunités qui peuvent naître de développer la coopération bilatérale.
Depuis votre prise de fonctions en septembre 2021, vous avez à cœur de rencontrer tous les acteurs institutionnels, économiques, culturels, de votre circonscription.
Quels sont les axes de développement en matière de coopération bilatérale entre la France et l’Italie que vous souhaitez renforcer, mettre en place, notamment dans le cadre du traité du Quirinal ?
En effet, j’ai à cœur de rencontrer le plus d’interlocuteurs possibles, mais je dois dire aussi que j’ai une chance particulière d’être arrivé à cette période, à deux titres. D’une part, les effets de la pandémie, avec laquelle nous apprenons à vivre, ne restreignent plus les déplacements ni les possibilités de rencontres, et c’est primordial. D’autre part, j’ai pris mes fonctions dans un moment particulièrement positif et dynamique de la relation bilatérale avec, comme vous le rappelez la signature du traité de coopération renforcée entre la France et l’Italie.
Pour ce qui est des axes, je dois d’abord rappeler qu’il n’y a pas d’agenda propre du consulat de Milan, tout ce que je fais, je le fais naturellement dans le cadre posé par l’Ambassadeur et dans le cadre des grandes orientations de la relation entre la France et l’Italie. Mais pour ce qui est de la mise en œuvre du Traité, j’ai été chargé plus spécifiquement, et c’est logique, de la partie liée au développement de la coopération régionale et transfrontalière, avec un accent donc sur les régions qui sont les plus géographiquement proches de la France. Et là, tous les domaines sont concernés, de la formation à la santé en passant par les sujets économiques ou le tourisme.
Pour ce qui est de la relation avec Trieste et la région Frioul-Vénétie Julienne, c’est naturellement un peu différent, mais je suis convaincu, plus encore après cette visite, que nous avons beaucoup de choses à faire ensemble pour mettre en place de très bonnes coopérations dans de très nombreux secteurs.
Vous avez connu récemment plusieurs temps forts nouveaux dans l’exercice de votre mission : l’organisation des élections pour la présidence de la République française, suivies des élections législatives, et la célébration du 14 juillet, comment cela s’est-il passé ?
Vous avez raison de parler de temps forts ! Il faut reconnaitre que l’organisation de deux élections majeures, donc quatre tours de scrutin, est une véritable gageure. Je ne suis peut-être pas le mieux placé pour le dire, mais je pense que tout s’est déroulé au mieux, et tout le mérite en reviens aux équipes du consulat qui ont travaillé de longues semaines en amont pour préparer tous les aspects du vote, dont l’identification des bureaux, la vérification des listes électorales ou le recueil des procurations. Je voudrais profiter de cette occasion pour leur rendre hommage et les remercier encore. Tout comme je veux aussi remercier les nombreux volontaires qui nous ont aidés à tenir les bureaux de vote les jours de scrutin et sans lesquels rien n’aurait été possible !
Pour ce qui est des célébrations du 14 juillet, au pluriel, puisque j’étais à Gênes le 13 au soir, à Milan le 14 en début d’après-midi et à Turin le 14 au soir, c’étaient des moments très forts pour moi. D’une part parce que c’étaient mes premières célébrations de notre Fête nationale en Italie et dans mes fonctions, et d’autre part parce qu’elles ont été de vrais moments de retrouvailles et d’échange. Elles avaient toutes leurs spécificités, à Gênes, elles se sont déroulées dans les locaux de l’Alliance française, un magnifique palais dans l’une des plus belles rues de la ville suivi d’un dîner très convivial et informel, à Milan dans le site prestigieux du conservatoire avec près de 400 personnes, des Français, des Italiens et bien d’autres nationalités qui y étaient également représentées, ce qui montre que l’importance symbolique de cette date dépasse de beaucoup les frontières de la France, et à Turin avec un moment très fort puisque la réception s’est tenue dans le musée du cinéma, la fameuse Mole Antonelliana sur le toit de laquelle la mairie de Turin a ensuite projeté une très belle image en l’honneur de cet événement, une relecture de la Marianne de Delacroix par l’artiste JonOne, qui a pu être vue et admirée par toute la ville.
En bref, des moments très exigeants pour les équipes s’agissant de l’organisation, mais autant de réussites grâces à elles !
Quel regard portez-vous sur l’action des Alliances Françaises, dont celle de Trieste, qui contribuent activement à l’apprentissage, au rayonnement de la langue française et de sa culture, sur le territoire italien ?
Elles sont indispensables à la politique d’influence de la France à l’étranger et elles font toutes, grâce aussi à l’engagement de membres remarquables et dans leur grande majorité bénévole, un travail quotidien formidable.
Ce sont des acteurs à part entière de la diplomatie culturelle avec toujours une volonté de s’adresser au public le plus large en organisant des événements qui correspondent aussi à la ville ou au territoire sur lequel elles se trouvent, qui peuvent apporter un regard neuf sur ce qui se passe en France dans tous les domaines, mais au-delà, en étant aussi des acteurs importants de promotion de la francophonie, que ce soit par l’enseignement de la langue ou par des initiatives qui impliquent les autres pays francophones.
J’ai d’ailleurs pu mesurer à Trieste le dynamisme et l’engament de l’équipe pour faire vivre cette structure. Et c’est d’autant plus remarquable que la période du Covid a marqué un coup d’arrêt très brutal aussi pour l’Alliance, que ce soit pour les cours qui sont importants et nécessaires au fonctionnement de la structure ou pour les activités culturelles. Mais je peux vous dire que les choses reprennent à vive allure et que tous les membres de l’Alliance de Trieste sont motivés !
C’est la première fois que vous veniez à Trieste, avez-vous été satisfait de vos échanges avec les autorités et les institutions locales ? Quelle a été votre impression sur notre ville ?
Oui, j’ai été très heureux de ces rencontres de haut niveau qui ont permis des échanges très larges sur tous les sujets. Maintenant, il faut aller de l’avant, je pense qu’il y a de vraies pistes de coopération pour que la France soit plus présente encore dans la ville et dans la région et je suis certain que, aussi avec l’aide de notre consul honoraire, Riccardo Illy, et de l’Alliance française, nous allons concrétiser tout cela.
Je compte d’ailleurs bien revenir aussi souvent que possible dans la région, ce qui est aussi une réponse à votre dernière question… j’avais surtout, comme beaucoup, une image de la ville de Trieste très associée à l’histoire, à la littérature. Mais j’ai découvert aussi une architecture magnifique, une ouverture à tous égards et un dynamisme dans tous les secteurs qui me font comprendre aussi pourquoi la ville est en tête en Italie des lieux où il fait bon vivre.